Friday, February 09, 2007

Globalisation.

La mondialisation du commerce commence par le troc. Des échanges où un seul des deux négociants connaît la valeur relative des marchandises. Lorsque l’indigène prend conscience de cette relativité, alors se met en place le colonialisme et le tribut d’empire. La métropole profite du travail et des matières premières provenant des nations soumises par ses soldats colons. Le commerce mondial ne s’effectue plus qu’entre métropoles impériales. Avec toutes les incitations guerrières que cela suppose.
La décolonisation instaure une forme de commerce mondial sous tutelle. Les anciennes métropoles contrôlent toujours le crédit bancaire, les transports et l’essentiel de la technologie. En échange de leurs produits, les nouvelles nations doivent se contenter d’un genre de redevance, une rente de situation. Ce n’est qu’à la fin de la guerre froide, en 1991, que ces zones d’influence perdent leurs dernières justifications.
Par un long processus encore en cours, les nations de la planète accèdent au marché sans contraintes. Malgré leur dépendance sur le crédit, le transport et la technologie des nations riches, le pouvoir de négociation des nations émergeantes semble s’améliorer. En formant des associations, elles peuvent parfois influencer les prix à leur avantage.
Le juste prix sur le marché mondial est encore un idéal à atteindre pour beaucoup de nations. Mais, le serait-il, cela ne résoudrait pas l’autre équilibre des échanges commerciaux extérieurs, celui de la valeur ajoutée de part et d’autre. Pour mieux comprendre, imaginons des échanges bilatéraux exclusifs entre deux nations. L’une des deux exporte du pétrole, l’autre exporte des chaussures. Cet échange, à juste prix, signifie que l’importateur de pétrole obtient une matière première à transformer. Tandis que l’importateur de chaussures met au chômage ses fabricants de chaussures nationaux.
Il y a des marchandises destinées à être transformées, qui mettent en œuvre du travail. Et il y a des marchandises destinées à être consommées, qui ne mettent pas en œuvre du travail. On voit que toute nation a intérêt à importer des matières premières (ou des produits intermédiaires) et à exporter des produits finis. Toutes ne peuvent le faire et ce sont les nations dominantes qui se réservent cette situation avantageuse.
Echanger des produits finis contre des matières premières assure de l’emploi et permet une augmentation du revenu investie. Echanger des produits finis contre des matières premières signifie que leur consommation se fait ailleurs et que le revenu qui lui est alloti peut être investie. La transformation (par l’échange) de produits finis en matières premières correspond à la transformation de consommation en investissement.
Les grandes nations industrielles se sont construites par l’appropriation des ressources et des emplois de la planète. Aujourd’hui, c’est au tour de la Chine. Elle transforme la consommation en investissement par son commerce extérieur. Mais elle le fait à une telle vitesse et à une échelle si énorme, qu’elle est en train de s’approprier le travail du monde entier. Et les revenus investis sont à l’avenant.
L’Europe, les Etats-Unis et le Japon en seront bientôt réduits à recevoir des droits pour leurs propriétés intellectuelles et des rentes sur leurs investissements, mais ils n’auront comme emplois que des services aux personnes (celles qui en ont les moyens). La production de biens étant toute localisée en Chine, il restera la domesticité.
Après avoir investi l’Europe, les Etats-Unis et le Japon, voilà que le capitalisme s’empare de la Chine. Mais le capitalisme se nourrit d’investissements, de revenus détournés de la consommation. Comme ses prédécesseurs, la Chine est donc obligée d’échanger ses produits finis contre des matières premières et des produits intermédiaires sur le marché mondial. Pour investir les revenus du travail, la consommation des richesses produites par ce travail doit se faire ailleurs. Pour continuer son expansion, ce système d’accumulation capitaliste doit pouvoir transformer une valeur croissante de produits finis en produits intermédiaires et en matières premières. Cette transformation se fait lors des échanges sur le marché mondial. Et elle se fait au détriment des autres participants au marché. Eux doivent désinvestir et emprunter pour générer des revenus et consommer plus de richesse que n’en produit leur travail. L’Etat vend les investissements qu’il possède au nom de la nation (privatisations), la dette publique et l’endettement des particuliers gonflent et la balance commerciale penche toujours plus pour le déficit.
Jusqu'à présent, ces grandes expansions capitalistes se sont produites dans un monde où les découvertes de ressources végétales et minérales étaient en expansion. Ce n’est plus le cas. Depuis quelques années on découvre que la planète a des limites et qu’il n’y en a pas d’autres, même au bout d’un long voyage. Et, puisqu’elle se fait au détriment des autres nations, l’accumulation capitaliste a toujours été source de conflits. Les nations industrielles ont constamment fait la guerre, l’ultime recours de leur domination. Alors que prédire pour cette gigantesque concentration en cours ? Qu’il n’y a plus de concurrence entre capitalismes nationaux pour attiser les antagonismes, puisque le capital réunit enfin l’humanité entière ? Que cette fois-ci tout se passera comme sur des roulettes, « And the world will be as one ». Par contre, quand ça coincera (car le capitalisme subit nécessairement ses propres contradictions), le séisme qui en résultera dépassera de loin tous les précédents.

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